Les traces

Jeudi 5 décembre 2013 : circuit Ste Cécile et Trace des Jésuites

Levé tôt, je descends au ponton m'oxygéner tandis que Laëtitia profite de la piscine déserte. A quelques encablures de la côte, quelques barques de pêcheurs sont à l'ouvrage.

Aux alentours de 9h plus ou moins un quart d'heure, nous retournons vers Morne-Rouge avant de bifurquer vers Deux-Choux. Peu après, nous sommes au départ d'une des "traces", ces sentiers empruntés autrefois par les amérindiens, les jésuites et les esclaves fuyant les plantations.

Dès le départ, Eric met la main sur une plante produisant un fruit de la taille d'une noix avec des poils durs. En l'ouvrant, on découvre à l'intérieur des boules rouges qui faisaient office de teinture par le passé. Dans le même coin, il récolte également un fruit jaune au goût de mangue.

Nous nous présentons ensuite à l'orée de la forêt : celle d'aujourd'hui est tropicale humide. Au sol, la boue peut en attester. Pendant une bonne partie de la matinée, nous allons grimper avec par endroits des marches naturelles très irrégulières et très hautes. Le sentier est traversé par d'innombrables racines qui courent en tous sens et souhaiteraient bien attraper les pieds d'un ou deux touristes. Ses bas-côtés sont spécialement abrupts et ne pardonneraient pas la moindre erreur. Il y a quelques jours, un trailer breton qui s'entrainait pour la course de samedi a disparu sur une trace similaire. Personne ne l'a retrouvé depuis. De temps à autre, on entend un hélico tourner au-dessus du couvert et, paraît-il, des chasseurs alpins le recherchent également depuis le sol. En vain.

Pour vous donner une petite idée de la bienveillance de la forêt, outre sa charmante faune évoquée il y a deux jours, passons à la partie florale : les arbres sont pour certains équipés d'armures redoutables et mieux vaut éviter de s'y appuyer en cas de perte d'équilibre. De même, par endroit, le sol s'est affaissé suite à l'écroulement d'un arbre par exemple. Un trou au bord du sentier en témoigne. 

Mais je vous garantis : nous arrivons à en profiter quand même parce que, si la nature cherche à nous effrayer parfois, elle nous charme le plus souvent par la beauté de ses plantes multicolores et l'originalité des formes que celles-ci revêtent.

Sur la toute fin de matinée, nous commençons à descendre pour aller déjeuner près d'un point d'eau. Nous sommes à présent sur la trace des Jésuites. Devant nous, un passage où la pente est si raide que les cordes disposées là pour s'y cramponner  se trouvent parfois à plus de deux mètres au-dessus du sol. Décidément, à en croire la taille des marches, des arbres, des feuilles aussi grandes qu'un parapluie ouvert et la position de cette corde, nous sommes devenus des fourmis évoluant dans un univers où tout est colossal. La nature rend le promeneur humble. Une autre alternative est heureusement possible : une voie où, après vérification, on peut se jeter (et s'écraser) de tronc en tronc sans se transformer en porc-épic et sans ressortir couvert de terre (pour la plupart).

Nous finissons par atteindre comme prévu la rivière du Lorrain que nous traversons une première fois à gué. Dans de ses méandres, nous trouvons refuge pour déjeuner (devinez quoi ?) et piquer une tête. Le bassin est toutefois modeste par rapport aux jours précédents avec une seule vasque profonde, c'est pourquoi nous sommes peu nombreux à aller dans l'eau  nous détendre quelques instants.

Le chemin pour retrouver la civilisation est toujours aussi sauvage mais présente moins de dénivelé que ce matin. Après quelques traversées à gué, Eric va en profiter pour taquiner quelques matoutous-falaises (les mygales rappelez-vous !). La dernière a son terrier juste au-dessous de lianes avec lesquels nous allons jouer les Tarzans et les Janes en herbe. Hélas, aucun de nous n'a été retenu pour le prochain film du genre. N'avions-nous pas la grâce des lémuriens ? Dépités, nous décidons d'effectuer le final de la balade en marchant plutôt qu'en sautant de liane en liane. Après tout nous ne sommes que des randonneurs et non pas des casse-cous. Mais je suis sûr qu'aujourd'hui des vocations se sont brisées dans cette forêt faute d'un public suffisamment connaisseur.

A travers un trou dans la végétation, nous voyons apparaître un ruban asphalté ! Nous avions beau entendre des bruits de moteurs depuis quelques minutes déjà, cette vision est un retour brutal à la réalité pour ma part, la forêt m'ayant transporté bien loin de là, dans un monde plus magique ou imaginaire qu'hostile et sauvage.

De retour au centre, l'après-midi est loin d'être achevée. Je poursuis donc ma découverte des environs à pied. Etant déjà allé vers St Pierre, je pars dans l'autre sens vers le Prêcheur par le littoral. C'est une vraie déception car le rivage est jonché de détritus parfois gros comme de l'électroménager. Et je pense pouvoir affirmer qu'aucun d'eux n'est arrivé là par la mer.

Au niveau de la pointe Lamarre, je regagne la route et arrive au Tombeau des Caraïbes. C'est un clin d'oeil à une ancienne légende selon laquelle les derniers autochtones se serraient jetés du haut d'un gros rocher pour échapper à l'esclavage. Sur place on retrouve donc un grand roc peint en blanc ainsi que 34 totems. Chacun d'eux est surmonté d'une tête en pierre à 4 faces et porte une inscription poétique.

La soirée est consacrée à l'apprentissage du kuduro, une danse d'origine angolaise qui peut se danser sur la chorégraphie du madison. J'avoue que je ne suis pas très "danse" mais quand Laëtitia m'a dit qu'il y avait 36 mouvements, c'était perdu d'avance. Pour être honnête, je crois qu'au bout de trois ou quatre, j'étais déjà largué ! C'est pourquoi j'ai raisonnablement préféré regarder ma meilleure amie qui se débrouillait très bien et avait bien plus le rythme que son entourage immédiat. Je crois que j'ai bien fait : j'aurais été ridicule même par rapport aux autres débutants ... Il n'y a que pour la danse des canards que je pourrais bluffer et encore !

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