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Le canal des Esclaves

Dimanche 8 décembre 2013 : clin d'oeil à Madère

Pas de programme, la journée est libre. Chacun part à droite ou à gauche, en excursion organisée vers une plage ou en voiture de location. Laëtitia opte pour le repos sur le centre. Je vais pour ma part effectuer une randonnée que j'avais repérée dans mon guide. Comme elle n'est pas très longue, je l'agrémente d'une petite visite de St Pierre et d'un crochet par un temple hindou dont j'ai vaguement entendu parler sans trop savoir où il est précisément. 

Laëtitia s'en va courir. Je prends la direction de St Pierre avec mon pique-nique pour la journée (du Saup... dont j'aurai découvert toute la gamme au cours de la semaine). St Pierre est une ville relativement étrange puisque les ruines de 1902 côtoient les habitations et autres édifices reconstruits. Je marque ma première pause aux vestiges du Théâtre non loin duquel se trouvait le cachot de Cyparis, un des deux survivants de l'éruption. Je parcours ensuite une des deux ruelles commerçantes qui part de l'ancien arsenal pour rejoindre la cathédrale. Son intérieur est sobre et revient sur la catastrophe qui aura marqué la ville à jamais. J'en profite pour me renseigner auprès de fidèles sur la direction du temple hindou. Dernier arrêt rapide à l'évêché et ses jardins avant de prendre la route vers Fonds-St-Denis. Un habitant tente comme hier de me dissuader d'y aller à pied et est prêt à me conduire. Décidément ... Je le remercie mais suis décidé à ne pas céder cette fois-ci.

Sur 3 kilomètres je suis la chaussée sans savoir précisément si le site religieux est après le prochain virage ou dans plusieurs dizaines de minutes. Sortant des derniers faubourgs de St Pierre, je longe les bananeraies dont les feuilles sont agitées par les bourrasques de vent. Des sommets avancent de lourds nuages noirs qui n'augurent rien de bon pour la suite de la journée.

45 minutes plus tard, j'entends résonner un son de tambour. Il semble venir de la direction vers laquelle je me dirige. Effectivement, le roulement vient bien de là et je finis par arriver devant un mini temple où se déroule une cérémonie. Les fidèles sont peu nombreux, une petite vingtaine tout au plus. Tandis que deux hommes tapent à intervalles réguliers sur leurs tambours, trois officiants multiplient les aller-retour entre l'intérieur où se trouve une stèle dédiée à Ganesh et l'extérieur où a été aménagé un autel. A chaque va-et-vient, de nouvelles offrandes, fleurs ou fruits, sont déposées sur la "table" sacrée.

Après quelques minutes le son cesse, l'agitation aussi. Les musiciens se dirigent vers de petits feux pour purifier leurs instruments dans la fumée qui en émane. 

 

J'aurais bien laissé mon esprit vagabonder encore un peu face à ces rites d'un autre continent, cependant bien du chemin m'attend encore. Réalisant que je ne progresse pas suffisamment vite, je décide de recourir au stop. Le premier véhicule qui passe s'arrête pour m'écouter. Je sais que c'est déjà gagné. La chance est de mon côté car le chauffeur, Henri, se rend à une centaine de mètres du canal. Agriculteur-éleveur, il va soigner ses bêtes à Fond-Mascret car il n'a pu s'y rendre hier : la tempête avait coupé la chaussée.

 

Déposé sur place, je vais commencer par ramer alors que les gouttes de pluie commencent à tomber. Le début du canal est caché dans de hautes herbes. Je passe ainsi à côté sans m'en apercevoir. Je sais que quelque chose cloche car mon guide précise de suivre la rivière et que je la traverse sans qu'aucune sente praticable n'apparaisse. Un peu plus loin un petit canal sur un muret à hauteur de regard. Une vieille dame sortant de je ne sais où comprend très bien mon erreur et me dit de le longer. Je m'exécute et reviens à mon point de départ. Premier tour du Mickey. J'ouvre grand les yeux mais ne vois toujours rien, pas la moindre trace. Je retourne donc vers le lieu où j'ai croisé cette femme dans l'espoir qu'elle m'en dise un peu plus. Toutefois, le lieu est à présent désert. Je rebrousse chemin presque jusqu'à mon second tour du Mickey quand j'aperçois, au sommet d'un mur bordant la chaussée, à plus de 3 mètres de hauteur, ce qui pourrait être le canal des Esclaves ou canal de Beauregard. C'est bien lui ! Je remonte jusqu'à la fourche où je n'ai rien trouvé à deux reprises pour tenter de comprendre ce qui a cloché. Aucun regret car le départ était totalement invisible à un oeil non averti.

Je repars dans l'autre sens pour 1h30 de descente le long de ce canal bâti il y a plus de deux siècles par les esclaves pour acheminer l'eau vers les distilleries de St Pierre et du Carbet. Ce qui me frappe et m'a poussé à effectuer cette balade, c'est la ressemblance avec Madère que Laëtitia et moi avons découvert cette année. Pas tant au niveau de la végétation bien sûr mais plutôt de la physionomie du cours d'eau que je vais suivre. Il s'agit de marcher la plupart du temps sur un muret d'une quarantaine de centimètres souvent au bord de précipices et toujours à flanc de mornes. Un tunnel aide également au rapprochement. Finalement, il ne manque que l'essentiel : ma coéquipière et meilleure amie. Dommage qu'elle ne soit pas là, je suis sûr qu'elle aurait apprécié !

La pente est très faible et pourtant l'eau court dans sa canalisation à ciel ouvert. De temps à autre, la végétation se clairseme et la vue se dégage sur un paysage tropical. Quelques instants d'inattention pour une photo ou une vidéo vont m'amener à prendre un bain de pied involontaire. Je peux donc affirmer que le canal est profond et l'eau plutôt bonne. Heureusement pour moi, un seul pied a raté le muret et fini dans l'eau. J'inaugure donc une nouvelle mode : un pied avec chaussette, un autre sans puisqu'elle doit sécher. Prendra-t-elle ou est-ce trop excentrique ?

En 3,5 kilomètres, je vais croiser une dizaine de personnes et un peu plus d'animaux : crabes d'eau douce (qu'est-ce qu'ils font là ceux-là ???), chèvres, lézards.

Vers 11h30, j'arrive au terme de la randonnée. C'était vraiment génial ! Je ne regrette pas mon choix du jour. A ce stade, il reste encore 3,5km supplémentaires à couvrir pour aller jusqu'au littoral. Je compte en effet pique-niquer à la plage où m'avait conduit ma balade du premier jour. Autour de moi, les essences sont nombreuses, parfois majestueuses par leur taille qui impose le respect.

Parvenu à mon objectif, j'ai à peine le temps de poser mon sac pour déjeuner quand j'ai l'immense surprise de voir surgir Laëtitia venue à ma rencontre. Quelle joie ! Elle me raconte que Xavier l'a accompagné jusque-là car, avant de partir, je lui avais indiqué mon itinéraire probable par sécurité. Je la laisse terminer sa baignade avec une partie natation synchronisée improvisée tandis que je garde ses affaires n'ayant pas mon maillot sur moi. Je constate dans le même temps que ma banane n'a pas du tout apprécié l'excursion, mais alors vraiment pas : elle a explosé dans mon sac pique-nique.

Nous rentrons au centre ensemble nous racontant nos demi-journées respectives puis allons rendre une visite de courtoisie à nos amis poissons du ponton. Un peu de lecture au bord de la piscine avant d'aller observer notre dernier coucher de soleil au QG. L'observation du ballet des astres, voilà ce qui me manque dans ma banlieue parisienne.

Au repas, pour la première fois de la semaine je prends de la viande. J'en avais presque oublié le goût mais le poisson à la plancha était si bon tout au long de la semaine !!!

La soirée se termine par du karaoké. Ce n'est toujours pas ma tasse de thé mais je prends plaisir à voir Laëtitia lancer la soirée, bientôt rejointe par son équipe habituelle. Tou(te)s y mettent tellement d'entrain que c'est un vrai bonheur d'être présent. J'apprécie aussi le clin d'oeil à l'Irlande lorsque les Lacs du Connemara emplissent la salle commune de souvenirs celtiques. Merci !

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